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mariage breton ancien
Comme l’a dit un "Bazvalan" :
« le mariage est un vaisseau qui vogue, exposé à toutes sortes de tempêtes, bien qu’au sortir du port la mer soit calme et belle »"C’est, en général, un tailleur qui est le bazvalan, ou messager d’amour du jeune homme, près des parents de la jeune fille ; il a souvent pour caducée, dans l’exercice de ses fonctions, une branche de genêt fleuri, symbole d’amour et d’union ; de là vient le nom qu’on lui donne[1]
[…] Il possédait chez les anciens Bretons un caractère si respectable, qu’il passait sans danger d’un camp dans un autre au moyen de sa baguette fleurie ; la science de mener à bien une ambassade d’amour était même alors tellement appréciée, qu’on la regardait comme indispensable à un jeune homme bien élevé.[2]"
Pour vous mettre le pied à l'étrier :
"La noce avait toujours lieu à cheval. Dès la fine pointe de l'aube, au jour marqué, la cour de la ferme se remplissait d'une joyeuse cavalcade qui venait chercher la jeune fille et ses parents pour les conduire à l'église.[3] "
"Le jour marqué, au lever du soleil, la cour de la fiancée se remplit d'une foule joyeuse à cheval, qui vient la chercher pour la conduire église. Le fiancé est à leur tête, le garçon d'honneur à ses côtés.[2] "
Le cortège se rendait donc à l’église à cheval, une course était organisée, et le premier arrivé à l’église gagnait un ruban.
Les “cavalcades” comme on les appelait étaient très dangereuse et faisaient souvent des blessés et des morts, et pour cause, les chevaux étaient nourris pendant une semaine avec de la graine de chanvre (qui peut-être une drogue).
Les Etats de Bretagne (le parlement breton) a interdit cette pratique en 1785, depuis lors il ni eu plus de chevaux et les cortèges se firent à pied.
Arrivée de la noce au bourg de Rosporden.La musique tout au long de la journée est avec la danse, la tradition du mariage breton qui est restée ininterrompue.
L'arrivé du fiancé à la ferme et buvant avec le futur beau-père
Jadis sur le chemin la menant vers l’église, la mariée était accompagnée par un véritable cortège constitué de musiciens, appelés les « sonneurs », qui la suivait à travers le village ou le quartier où se situait l’église. C’était l’occasion de faire une entrée remarquée auprès des villageois qui se pressaient à leurs fenêtres pour admirer la belle mariée !"Au sortir de l’église, les gens de la noce sont salués par cent coups de fusil, et regagnent, au son des bombardes, des biniou et du tambourin, la demeure de la mariée, où les attend le gala.[2] "
"La noce sortait enfin de l'église. Bim! Boum! De tous côtés, sur la place du bourg, pétaradaient les coups de fusil; bombardes et binious éclataient en sonorités aiguës. L'assistance remontait à cheval et reprenait le chemin de la ferme.[3] "
Ce que n'écrivent pas ces chroniqueurs, mais que d'autres on écris, c'est que :"Dans une grande partie de la Basse-Bretagne la tradition ancienne imposait de faire, entre la sortie de l'église et le repas, une ou plusieurs danses [...] 4"
Danses d'honneur
Tout comme l'ont portes un toast pour rendre hommage ou pour célébrer quelque chose, ici nous « processionnons » ou nous dansons.
Il est des zones de Bretagne où il existe une Gavotte d'Honneur .
Elle se fait à diverses occasions (comme lors d'un fest-noz pour rendre hommage à une belle soirée). Elle n'est ni annoncée ni commentée. Aucune parole n'est prononcée ce sont les sonneurs ou les chanteurs qui l'interprètent lorsqu'ils sentent le moment opportun.
L'honneur est rendu par le maestria déployé par les danseurs qui ressortent toute la fierté, la grâce, la beauté, l'énergie voir même l'agilité (en Trégor) qui s'en dégage.En d'autres lieux, ce n'est pas une danse en particulier, mais un air de danse (parfois danser un couple pour l'occasion plutôt qu'en chaîne et parfois aussi surnommé « Gavotte Sacré »).
En d'autres lieux encore comme en pays vannetais c'est le moment choisi qui confère l'honneur aux danses habituellement ordinaires.
Cette danse d'honneur ou ces danses sont appelés « dans an eured » (danse de mariage) lorsqu'elles se fond à deux moments particuliers au cours d'une noce.
D'abord c'est au sortir de l'église qu’une ou plusieurs danses se faisaient et parfois en plusieurs endroits du bourg, ainsi les marches et les danses se succédaient. Ce premier groupe de danses étaie aussi appeler « dans an dud nevez » (danse des nouveaux mariés).Ensuite et dans certains coins seulement d'autres danses d'honneur étaient jouées après être arrivé sur le lieu du banquet. Cette danse « an eured » avait le mérite de faire attendre que le banquet soit près.
Précisons encore que selon les régions de basse Bretagne leurs déroulements faisaient l'objet d'une étiquette très stricte ou non.
Faire ripaille et danser !
"Au moment de se mettre à table, un vieillard récite le Benedicite ; chaque service est précédé d’un air de biniou et suivi de danses.[2] "
« Plus on est pauvre en Bretagne, plus on tâche qu'il y ait d'invités à la noce. C'est que, là-bas, les convives ne paient pas seulement leur écot : ils offrent encore aux mariés les éléments du repas de noce, beurre, œufs, boudins, arbelèze5, cuissots de veau, et la boisson par surcroît. Aucun peuple n'a l'esprit plus communautaire et n'est en même temps plus jalousement individualiste. Je ne me charge pas de vous expliquer cette contradiction. Tant y a que, grâce aux cadeaux de toutes sortes qui affluent chez les nouveaux époux, les moins fortunés ont de quoi se mettre en ménage et faire face aux premières nécessités de leur vie commune. La mutualité bien entendue produit de ces miracles.3"
“Pep hini a balo he skoden”
(Chacun bêche sa tige, Chacun se cotise pour payer sa part)Ces noces réunissaient donc régulièrement 800, 1500, 2000, 3000 "invités" voire bien plus, jusqu’à 5000 personnes.
Les mariages s'étalaient sur plusieurs jours (trois à cinq).
L'immense majorité des noces étaient campagnardes et se déroulaient dans des champs car il n'existait pas de structures spécifiques assez grandes (voir photographie ci-dessous).
Pour recevoir autant de convives il fallait toute une organisation communautaire et réunir beaucoup de matériel.
"Commencé à midi, le festin ne s'achevait souvent qu'à six heures du soir. Chaque service était annoncé par un air de biniou et de bombarde.[…]
Puis, les tables enlevées, jeunes filles et garçons nouaient leurs rondes sur l'aire neuve. Les jabadao succédaient aux passe-pieds, les laridés aux gavottes.[…][3]""Bien avant dans la nuit, surtout en été, les danses se prolongeaient, […][3]."
"Des danses plus récréatives avaient lieu après le repas, mais pouvaient commencer pendant4"
La noce sortait enfin de l'église. Bim! Boum! De tous côtés, sur la place du bourg, pétaradaient les coups de fusil; bombardes et binious éclataient en sonorités aiguës.
Ar wreg, an arc'hant hag ar gwin, o deus o mad hag o binim.
(en français) : La femme, l'argent et le vin, ont leurs vertus et leur venin.Le lendemain de la noce est le jour des pauvres :
Au second service, celui-ci [le marié] offre le bras à la mendiante la plus respectable, la jeune femme [la mariée] donne le sien au mendiant le plus considéré de l’assemblée, et ils vont danser avec eux. […] On commence en général par une ronde en l’honneur de l’épousée.[…]
Mariage princier
"Faites silence, tous, faites silence, si vous avez deux oreilles pour entendre !
Faites tous silence pour écouter ce qui est ordonné :
C’est la noce de la fille du roi ; y vienne qui voudra dans huit jours ;
A la noce, petits et grands qui demeurent en ce canton ;
A la noce, gentilshommes de toutes les parties de la Bretagne,
Gentilshommes et juges, gens d’église et guerriers ;
Et d’abord les grands Comtes, et les riches et les pauvres ;
Et les riches et les pauvres, ni or ni argent ne leur manquera ;
Il ne leur manquera ni chair, ni pain, ni vin, ni hydromel à boire ;
Ni escabelles pour s’asseoir, ni valets vifs pour les servir ;
Il sera tué deux cents porcs et deux cents taureaux engraissés ;
Deux cents génisses et cent chevreuils de chacun des bois du pays ;
Deux cents bœufs, cent noirs, cent blancs, dont les peaux seront également partagées.
Il y aura cent robes, et de laine blanche pour les prêtres ;
Et cent colliers d’or pour les beaux guerriers ;
Plein une salle de manteaux bleus de fête pour les demoiselles ;
Et huit cents braies neuves pour les pauvres gens ;
Et cent musiciens sur leurs sièges, feront de la musique jour et nuit, sur la place ;
Et Merlin le Barde, au milieu de la cour, célébrera le mariage.
Enfin, la fête sera telle, qu’il n’y en aura jamais de pareille. "
Hersart De La Villemarqué, Barzaz Breiz 4e edition 1846 vol 1, Merlin-Barde. - Marzin - barz. Page 124.[1] On appelait ce messager d'amour le bazvalan, des deux mots celtiques : baz, baguette, et balan, genêt, parce qu'il avait d'habitude pour caducée une branche de genêt fleuri.
[2] Théodore Hersart De La Villemarqué. Barzaz Breiz, chants populaires de la Bretagne. Édité par François Maspero en 1981 à Paris, page 412.
[3] Charles Le Goffic, Fêtes et coutumes populaires, Armand Colin éditeur, Paris 1911.
4 Jean-Michel Guilcher, La Tradition populaire de danse en Basse-Bretagne, Mouton, 1976, pages 25.
5 ARBELÈZE, s. f., côtes de porc frais non séparées. Nous aurons une arbelèze pour rôti.
Mémoires de la Société royale des antiquaires de France, Volume 4, J. Smith, Paris, 1823, page 324